webMande
Henri Labouret
ancien Gouverneur des Colonies
Professeur à l'Ecole Nationale des Langues orientales vivantes
et à l'Ecole Coloniale
Les Manding et leur langue
Gouvernement Général de l'Afrique Occidentale Française
Bulletin du Comité d'Etudes Historiques et Scientifiques de l'A.O.F.
T. XVII, n° 1, Larose, Paris, janv.-mars 1934. 270 pages.
Chapitre I
Le pays des Manding est situé à peu près entre les 16° et 6° de longitude Ouest, les 6° et 14° de latitude Nord. La partie de cette région qui correspond à la vallée supérieure du Niger, au sud-ouest de Bamako, a reçu différentes appellations qui se sont étendues peu à peu à l'ensemble des terres occupées par les Manding.
Ses habitants la nomment : mandeng, maneng, mande, mane, manding, maning, mandi, mani ;
les Soninké : mande, mandi ;
les Bambara et les Dyula : mani et mane ;
les Peuls et leurs voisins : malle, mallel, mali et melli ; les Berbères : mel et mellit, noms qui figurent déjà sur les cartes du Moyen-Age
les Arabes : melul et malel.
Ces termes désignent tous le pays et l'empire dit de « Mali ou de Melli », mentionnés pour la première fois, semble-t-il, en 1339, sur la carte d'Angelino Dulcert, et qui sont aujourd'hui bien identifiés.
Le sol de cette immense contrée est généralement formé de roches cristallines décomposées, de silicate d'alumine ayant donné naissance à la latérite, qui se rencontre tantôt sous l'aspect de couches épaisses et dures, tantôt sous celui de brèches à consistance variable, mais toujours teintées et dans lesquelles domine la couleur rouge.
Le climat du Manding est tropical ; il est conditionné par la situation géographique de cette région et les variations thermiques comportant deux maxima : l'un au printemps, I'autre en automne, et deux minima en hiver et en été. Il est marqué par une saison des pluies qui dure sans interruption de juin à octobre. Les précipitations atmosphériques y déterminent, comme partout, l'hydrologie ; elles oscillent entre 0 m. 60 cm. et 1 m. 25 par an, du Kaarta septentrional au sud du Manding. On peut distinguer, avec M. H. Hubert, trois zones caractérisées dans cette partie du Soudan :
- Entre le 16° et le 14° lat. N. : seuls les grands fleuves, le Niger et le Sénégal, coulent toute l'année
- Entre le 14° et le 10° : les cours d'eau moyens et leurs affluents sont alimentés en permanence
- Entre le 10° et le 60 : toutes les rivières coulent sans arrêt.
La végétation du Manding est celle que le professeur A. Chevalier nomme soudanaise ; elle comporte un assez grand nombre d'arbres à feuilles caduques, notamment : l'arbre à beurre ou karité (Bassia Parkii), le néré (Parkia biglobosa), le caïlcédra (Khaya senegalensis), le baobab (Adansonia digitata), le fromager (Eriodendron anfractuosum), le tamarinier (Tamarindus indica), hauts de 4 à 10 mètres et au pied desquels poussent des arbustes rabougris durement éprouvés, chaque année, par les feux de brousse.
Dans le Sud, les arbres deviennent plus nombreux et plus élevés, à mesure que l'on s'approche du littoral ; les galeries forestières s'épaississent autour des cours d'eau, les lianes enveloppent les troncs avec plus d'insistance, les fougères et les palmes annoncent la végétation sylvestre qui encadre le golfe de Guinée. Entre ces futs poussent des graminées vivaces atteignant parfois quatre mètres de haut, étouffant et menaçant la végétation ligneuse qui les domine. Dans l'ensemble, le pays Manding a l'aspect d'une savane, à peine ondulée, plus ou moins ombragée, assez monotone.
La faune sauvage est celle du Soudan occidental. La partie septentrionale et moyenne se prête à l'élevage des boeufs, des moutons, des chèvres, de l'âne et du cheval. Au-dessous du 11°, la plupart de ces animaux ne peuvent vivre à cause de la présence des tsé-tsés, seuls quelques ovins et les caprins de race naine subsistent.
La famille manding constitue, au point de vue anthropologique, une subdivision de la sous-race dite soudanienne, que l'on a proposé d'appeler sous-groupe somatique nigérien. Ses membres sont caractérisés par :
- une peau brun-noir
- une stature assez élevée, 1 m. 70
- un indice céphalique de 74
- un indice nasal de 102
Les mensurations ont révélé, chez les populations de ce rameau, une variation brachycéphale très nette, en dépit de la dolichocéphalie qui est, d'habitude, l'apanage du Nègre. Ces peuplades ne sont pas les seules à offrir cette particularité qui est aussi commune, en Afrique Occidentale, aux Haoussa, aux Ashanti, aux Sonrhaï, aux Wolof et aux Serer. Haddon, en relevant cette constatation, suppose qu'elle est due à un métissage des Nègres avec des Hamites de race brune venus d'Ethiopie et de la vallée du Nil. On peut également penser qu'elle résulte d'un mélange de Noirs avec les Berbères de l'Afrique du Nord et même avec des Sémites émigrés au Maghreb et plus au Sud. Les traditions indigènes, confirmées par les archéologues et les historiens, viennent corroborer cette hypothèse. Elles affirment, en effet, qu'aux environs de l'ère chrétienne la Mauritanie, le Soudan septentrional et une partie du Sahara étaient occupés par des Noirs dont les principaux groupes se trouvaient alors dans le Hodh, en contact avec les Berbères.
On peut admettre que ces Noirs, plus ou moins métissés, ont donné naissance à trois des grands rameaux ethniques ayant contribué à peupler le Soudan occidental :
- à l'Est, les Proto-Serer
- à l'Ouest, les Sonrhaï
- au Centre, ceux qu'on nomme parfois les Wangara, et qui sont les ancêtres des Mandingues.
Deux facteurs essentiels paraissent avoir provoqué le recul des populations nègres vers le Sud. Le premier est l'assèchement progressif du Sahara et du Sahel ; le second est l'hostilité des Berbères. Pendant de longues années, ceux-ci ne furent guère redoutables pour les sédentaires noirs ; mais, vers la fin de l'empire, les Romains introduisirent en Berbérie le chameau récemment venu d'Asie et d'Egypte. Cet animal, utilisé comme monture était accompagné par ses conducteurs habituels, les nomades, qui ne tardèrent pas à s'en servir pour entreprendre à travers le désert des expéditions à grand rayon. Bientôt, la fréquence des attaques qu'ils subissaient de la part des chameliers pillards, détermina les cultivateurs nègres à se replier vers la vallée du Niger. Il est malheureusement impossible de reconstituer avec certitude l'ordre et les itinéraires de ces migrations et de celles qui les ont précédées.
Les habitants du pays manding ne sont pas désignés par une appellation générale, on les nomme suivant les contrées: Malinké; Kassonké, Bambara ou Bamana, Dyula ou Dyura, Mandigo, Wangara. Malinké et kassonké sont des termes peuls, adoptés par nous et passés dans l'usage en Afrique Occidentale Française ; mais les indigènes qui occupent le Manding se nomment eux-mêmes: mande-nka, mane-nka, mandinka, mani-nka, en accolant au nom de leur pays un suffixe de nationalité : nka, ñga, nga. Ceux qui peuplent le Kasso s'appellent, pour la même raison, Kassonka.
Le mot Mandingo, dont nous avons tiré « mandingue » ou « manding », est une expression dialectale du Sud et de l'Ouest, primitivement employée surtout par les Anglais de Sierra Leone et de Gambie.
Wangara en usage chez les auteurs arabes à partir du Xe siècle, sert actuellement à désigner les Manding et leur langue parmi les Maures, les Sarakollé, les Sonrhai, et surtout les Haoussa. Cette dénomination est quasi officielle en Gold Coast et en Nigéria. Elle paraît être la déformation du mot Gangaran, attribué par les Manding à la province aurifère de la Basse Falémé et du Bambouk et qui aurait donné Gbangaran, Gwangaran, Wangara, formes écrites par les arabes du Moyen-Age, Gangara, pl. Gangari .
Différentes explications ont été proposées pour les termes malinké, bambara ou bamana et dyula.
Celle qui prétend assimiler le terme peul mali-nke, habitant de la région du Mali, au mot manding mali-nke homme de l'hippopotame (mali) est certainement à rejeter.
Delafosse suggère, d'après les indigènes : ma-nde, enfant de la mère, c'est-à-dire souche dans laquelle la descendance et l'héritage se transmettraient en ligne maternelle. C'est assez douteux, de même que maa-nde, enfant du maître.
D'autre part, on n'a pas hésité à rapprocher arbitrairement le nom des Bambara de celui du caïman bamba ou bama et à faire d'eux les « gens du caïman », explication manifestement erronée et que les intéressés n'admettent pas.
Peut-être faut-il accorder plus d'attention à : bã refus ou renonciation ; ba ou ma : mère; na ou ra : à renonciation à la mère, c'est-à-dire adoption de la descendance en ligne paternelle. Mais rien ne prouve que cette étymologie soit exacte.
Il faut accueillir avec une égale circonspection l'argumentation des Dyula qui tirent leur nom de dyu, fond, souche, ce qui leur permet de faire remonter leur origine à une ancienne noblesse ayant, d'après eux, occupé le Massina occidental à une époque reculée.
Suivant Delafosse, le peuple manding était déjà formé au début de l'ère chrétienne. Ayant pris naissance, comme il a été dit, dans la Mauritanie actuelle, peut-être dans la région du Hodh, il aurait gagné les pays voisins en occupant peu à peu des territoires situés plus au sud, parvenant ainsi jusqu'aux districts aurifères de la Basse Falémé et du Bambouk, qui eurent une influence remarquable sur ses destinées. Ils fournirent, en effet, pendant de longues années, la plus grande partie de l'or qui alimentait le Proche-Orient par le marché de Koumbi, capitale supposée du puissant empire du Gana, dont le Manding devint bientôt le tributaire. Lorsque cet état s'affaiblit au XIe siècle, par suite du dessèchement de la contrée et des attaques conduites par les Almoravides, le Manding reprit son indépendance.
L'Histoire de ce pays est encore mal connue, surtout à l'origine, en dépit des importants travaux de Delafosse, Vidal, Gaillard, Monteil. Comme le fait remarquer ce dernier, il est possible qu'il y ait eu deux royaumes manding :
- Un Mali septentrional ayant peu retenu l'attention jusqu'ici et dans lequel se seraient succédé trois dynasties : celle des Taraoré, dans la province du Kiri, à l'est de Niagassola avec sa capitale à Dakadiala; celle des Konaté, dans le Dodougou, capitale Tabou; enfin, celle des premiers Keyta, capitale Naréna.
- Un Mali Méridional sur lequel nous possédons des renseignements imprécis et confus. Il aurait eu pour capitales successives: Dyériba et Yani, Nyani ou Nyéni, ville dont le nom et la situation exacte sont contestés.
Voici, d'après Delafosse et Charles Monteil, le résumé des faits légendaires et historiques se rapportant à ces deux royaumes.
I. Mali septentrional
- ? Une famille Tiraoura fonde son autorité dans la province du Kiri et installe sa capitale à Dakadiala. Plus tard, les membres de ce groupement, convertis à l'islamisme, prennent le nom de Taraore.
- ? Vers la même époque, les descendants d'un certain Guimba, de la famille des Konaté, dominent le Dodougou et s'établissent à Tabou.
Ces deux petits royaumes sont tributaires de l'Etat du Gana.
- ? A une époque indéterminée, les Konaté auraient réussi à soumettre les Taraoré et le Kiri avec l'appui du Gana.
- 1090 ? Après la dislocation de l'empire du Gana, un chef Konaté, Gourmandana, peut-être Baramendana ou Sarbendana, devient chef suprême et indépendant du Mali septentrional, dont l'histoire détaillée nous demeure inconnue.
- XIIe ? Vers la fin du XIIe ou le début du XIIIe siècle, I'ancêtre des Keyta, étranger venu de l'Est ou du Nord-Est, et nommé probablement Kabala, s'établit à Dyeriba sur le Niger, non loin de Siguiri.
- 1200-1218. Un de ses descendants, Nare-Fa-Magan, allié aux gens du Kiri, combat les habitants du Dodougou et devient chef suprême du Mali.
- 1218-1228. Dangaran-Touma, fils de Nare-Fa-Magan et de sa femme Koutouyoro Boula, succède à son père, mais est attaqué et vaincu par Soumangourou-Kanté, chef de Sosso ou Soussou. Sa famille s'enfuit au Kissi, tandis que les habitants des royaumes du Kiri et du Do se réfugient dans le Sankaran pour y former une confédération dont les membres furent appelés Kondé.
II. Mali méridional
- 1230-1255. Soun Diata, nommé aussi Mari Diata, était probablement un des fils de Naré-Fa-Magan. Les événements de son règne sont obscurcis par des légendes merveilleuses et des récits contradictoires. Il paraît avoir lutté contre Soumangourou-Kanté qu'il défit, ainsi que les voisins du Manding. A la suite de ces succès, le souverain étend son autorité sur diverses provinces et organise ses états.
- 1255-1270. Ouali, fils de Soun Diata, succède à son père ; on l'appelle parfois Mansa Oulé, le prince rouge. Il fait un pèlerinage à La Mecque entre 1260- et 1270.
- 1270-1274. Son frère, Ouali, lui succède. Il est remplacé, à sa mort, par son frère.
- 1274-1275. Kalifa, prince cruel et faible d'esprit, détrôné au bout de quelques mois.
- 1275-1285. Le pouvoir revient alors à Abou-Bakari, qui aurait été un neveu utérin de Soun Diata.
- 1285-1300. La faiblesse de ce prince provoque des troubles intérieurs qui permettent à un affranchi de la famille royale, Sakoura, de s'emparer du trône. Il étend bientôt ses conquêtes parmi tous ses voisins et le renom de sa puissance parvient jusqu'au Maghreb et en Egypte. Il accomplit le pèlerinage à la fin du XIIIe siècle et fut assassiné au retour par les Danakil. C'est probablement Sakoura qui asservit le pays des Sonrhai.
- 1300 1305. Gaou, fils de Soun Diata, succède à Sakoura.
- 1301;1310. Il est remplacé par son frère Mamadou, et ce dernier par
- 1310-1312. Abou-Bakari, sur lequel on ne possède aucun renseignement.
- 1312-1337. Moussa Ier ou Kango Moussa (fils d'une femme nommée Kango, appelé aussi Kankan Moussa), fait le pèlerinage et arrive au Caire en 1324. La tradition le présente comme un prince fastueux entouré d'une suite nombreuse et disposant d'une quantité considérable d'or. Mais ses prodigalités l'obligent à emprunter de l'argent en Egypte pour rentrer au Soudan. Accompagné à son retour par un certain nombre d'hommes de race blanche, Kango Moussa favorise et multiplie les relations qui existaient déjà entre son royaume, le Maghreb et l'Egypte.
- 1337-1341. Magan Ier monte sur le trône à la mort de son père Moussa Ier. Son règne est troublé par une attaque des Mossi, qui, sous le commandement du Naba du Yatenga, s'emparent de Tombouctou et pillent les régions voisines.
- 1340-1360. Le successeur de Magan Ier est son oncle Suleyman, frère de Moussa. Ce prince entretient les relations, affermies par ses prédécesseurs, entre le Soudan et l'Afrique Septentrionale, il en noue d'autres avec le sultan de Fez, et favorise les étrangers. En 1352, le voyageur et géographe arabe Ibn-Batouta visite le Manding ; il est frappé de l'ordre et de la sécurité qui régnent partout, de l'étiquette de la cour, de la bonne administration du pays et de l'état florissant des finances. Il constate, par ailleurs, l'impopularité du souverain et son avarice.
- 1360. Kassa, fils de Suleyman, succède à son père, mais règne seulement neuf mois.
- 1360-1374. Il est remplacé par son cousin, Mari Diata II, fils de Magan, dont le règne assez terne est surtout connu à cause de l'ambassade que le souverain du Manding envoya, en 1360, pour porter des présents à Abou Salem, sultan de Fez.
- 1374-1387. Moussa II succède à son frère Mari Diata. Il est habilement secondé par un de ses ministres, nommé aussi Mari Diata, et qui rétablit son autorité dans les provinces lointaines, notamment sur la ville de Takedda.
- 1388-1390. Makan II remplace, sur le trône, son frère ou cousin, mais il est tué un an après son avènement.
- 1388-1390. Sandigi, usurpateur dont le véritable nom ne nous est pas parvenu, prend alors le pouvoir et le garde deux ans.
Presque tous les renseignements qui précèdent ont été fournis par Ibn-Khaldoun, mais cet auteur acheva d'écrire son Histoire des Berbères en 1396 et mourut en 1406. Après lui, nous savons fort peu de chose des Manding, en dehors de quelques indications figurant dans le Tarikh-es-Soudan et dans les vieilles relations portugaises.
Au début du XVe siècle, la puissance manding décline.
- 1400. Makan III ou un de ses successeurs immédiats régnant, Bonga, souverain mossi du Yatenga, ravage le Massina oriental.
- 1433. Le chef touareg Akil s'empare de Tombouctou, Araouan et Oualata.
- 1465. Sonni Ali Ber, empereur de Gao et tributaire du Manding s'affranchit, refoule les Touareg de Tombouctou, annexe à l'empire la ville de Djenné.
- 1477. Le chef mossi du Yatenga, le naba Nasséré, ravage le Massina, pille Oualata et rentre dans ses Etats vers 1480.
- 1481. Mamadou, empereur du Mali, successeur de Mansa Oulé II et du père de ce dernier, Moussa III, envoie une ambassade au Portugal pour solliciter une alliance contre les ennemis qui le menacent.
- 1482-1485. Deux ambassades portugaises, l'une partie de Gambie, l'autre d'Elmina, se rendent à la cour de l'empereur manding.
- 1500. Omar Komdiago, frère de l'askia de Gao, dévaste le royaume de Diara et l'annexe à l'empire sonrhaï.
- 1506. Mohammed I, empereur des Sonrhaï, s'empare de tout le Mali septentrional.
- 1530-1535. Les Peuls et Toucouleurs du Fouta Toro, conduits par Koli Tenguéla, cherchent à s'emparer des mines d'or du Bambouk et attaquent les Manding des rives de la Falémé.
- 1534. Mamoudou II, souverain de Mali, reçoit dans sa capitale une ambassade portugaise envoyée par le roi Jean III et conduite par Peroz Fernandez.
- 1542. L'Askia Issihak I, vient razzier la province du Bendougou. Peu après, son frère Daoud entre dans la capitale de Mali et occupe le palais du souverain.
- 1599. Le souverain de Mali, Mamoudou III, allié aux Peuls du Massina, cherche à s'emparer de Djenné. Il est repoussé par les habitants, soutenus par les Marocains maîtres de Tombouctou.
- 1630. Les Bambara de la région de Ségou, devenus nombreux et puissants, luttent contre les Marocains de Djenné et le souverain de Mali.
- 1645. Les Bambara païens attaquent l'empereur musulman de Mali et s'emparent des deux rives du Niger jusqu'à Nyamina.
- 1670. Biton Kulibali fonde l'empire bambara de Ségou. Il est attaqué sans succès dans sa capitale par Mama Magan, dernier souverain manding de la dynastie des Keyta qui abandonne Nyamina après sa défaite et se retire à Kangaba. L'empire manding a vécu.
Chronologie de l'Empire de Ségou
Les Koulibali
- 1660-1710 : Mamari, dit Biton Koulibali
- 1710 : Bakari
- 1710-1736 : Dekoro
- 1736-1740 : Ton Massa Dembélé
- 1740-1744 : Kanou-Ba-Nyouma
- 1744-1748 : Kafa Dyougou
- 1748-1750 : anarchie
Les Dyara
- 1750-1787 : Ngolo
- 1787-1808 : Ma-N-Son
- 1808-1827 : Da
- 1827-1839 : Tyé-Folo
- 1843-1843 : anarchie
- 1843-1849 : Ben
- 1849-1851 : Kon-Magan
- 1851-1854 : Demba
- 1854-1856 : Touro-Koro-Mari
- 1856-1862 : Ali. Arrivée d'El Hadji Omar à Ségou. 16 mars 1861.
- 1862-1870 : Kégné-Mari
- 1870-1878 : Nyene-N-Ba
- 1879 : Mamourou
- 1879-1887 : Kara-Moko
- 1887-1890 : Mari-Dyara
Après une tentative pour assurer l'autorité de Bodyan, a région de Ségou est administrée directement.
Chronologie des chefs du Kaarta
- 1670-1690 : Massa
- 1690-1700 : Beni-Fali-Sekolo
- 1700-1709 : Gran, dit Foro-Koro
- 1709-1760 : Seba, dit Mana
- 1760 1780 : Deni-Ba-Bo
- 1780-1789 : Sira-Bo
- 1789-1802 : Dessé-Koro
- 1802-1811 : Ntin-Koro
- 1811-1815 : Sara-Ba
- 1815-1818 : Moussou-Koura-Bo
- 1818-1835 : Bo-Dyan-Mori-Ba
- 1835-1844 : Nyarale-N-Gran
- 1844-1854 : Mamari-Kan-Dyan
Chassés par El Hadji Omar, les Massa-si du Kaarta se réfugient à Bangassi (Foula-dougou).
- 1854-1870 : Diringa-Mori
- 1870 : Bousseï
Les faits de l'histoire du Manding actuellement connus montrent que les habitants de ce pays ont été en contact pendant le Moyen-Age avec l'Afrique du Nord, l'Egypte et l'Arabie.
Il est probable que leurs relations avec des représentants de la culture méditerranéenne remontent beaucoup plus haut, comme le laissent supposer des découvertes archéologiques, ethnographiques et même linguistiques récentes.
D'autre part, les Manding, qui trafiquaient avec les Arabo-Berbères du Nord, ont aussi fréquenté, depuis le XVe siècle, certains points du littoral, de l'Atlantique et du Golfe de Guinée, établissant ainsi, bien avant l'occupation européenne, des liaisons avec des marins et des commerçants de culture occidentale.
Ainsi s'expliquent des emprunts très anciens ou simplement anciens dont on retrouve la trace dans la langue, les techniques et les institutions des Manding.
Les sociétés manding, rustiques et villageoises, ont pour activités principales l'agriculture et l'élevage, elles se livrent accessoirement aux industries domestiques et au commerce.
Ainsi que les autres cultivateurs soudanais, les Manding sont retenus dans leurs champs pendant toute la saison des pluies, mais ils sont libérés de ces soins après la récolte, vers septembre ou octobre. La vie de relations devient plus intense à ce moment; toutes les cérémonies cultuelles et sociales d'importance s'accomplissent dès que la moisson est rentrée, et pendant la saison sèche.
Les travaux agricoles s'effectuent au moyen de la houe, dans d'assez mauvaises conditions. Le Soudan occidental, qui emprunta tant de techniques au monde méditerranéen, n'a pas su importer du Maghreb la petite charrue nord-africaine ; il ignore la pratique de l'assolement.
Un terrain choisi est d'abord nettoyé par la hache et par le feu, puis retourné et semé. Il porte moisson, sans être fumé, durant trois ou quatre ans, parfois même pendant sept ans, après quoi il est épuisé; on l'abandonne alors à la végétation spontanée pour qu'il puisse se reposer et se refaire. Une autre parcelle est aussitôt débroussée et aménagée. Ce procédé de culture extensive oblige le soudanais à changer constamment son champ de place. Cette particularité explique, sans doute mieux qu'une prétendue défense formulée par la divinité du lieu, l'absence de véritable propriété rurale dans ce pays, qui connaît seulement l'usufruit et l'usage.
Le sol, traité par cette méthode imparfaite, fournit différentes espèces de mil et de millet qui constituent la principale ressource alimentaire dans toute cette zone géographique. Il donne encore de l'éleusine, des haricots, des pois souterrains, des arachides, des patates, du manioc et, dans le Sud, des ignames de bonne qualité.
En dehors de l'agriculture, les Manding se livrent à l'élevage, mais ils considèrent leurs troupeaux comme des signes apparents de richesse dont on ne saurait se priver sans raisons capitales. Des boeufs sont bien sacrifiés, en nombre restreint, pour les funérailles du chef de famille, quelques têtes de bétail serviront à conclure un accord matrimonial, de temps en temps un de ces animaux sera égorgé pour une cérémonie ou une fête, mais, en général, la viande n'entre guère dans l'alimentation, non plus que les produits de l'élevage, lait, beurre et fromages, car on ne veut traire ni vaches, ni brebis, ni chèvres.
D'autre part, ces bêtes, gardées avec un soin jaloux, ne servent pas à la traction dans un pays ignorant les véhicules à roues, mais on utilise quelques bovidés pour porter des charges. L'administration qui s'efforce d'introduire la charrue dans l'agriculture manding, essaie depuis plusieurs années de faire dresser des boeufs à tirer le joug ; elle rencontre une certaine résistance de la part des propriétaires. Ce désir de ménager les animaux ou cette insouciance pour les utiliser aboutit à un résultat paradoxal: dans ce pays, en période d'évolution, les transports se font soit à tête d'homme, soit au moyen d'automobiles importées depuis quelques années.
Les industries locales, peu développées et toutes domestiques, sont d'abord celles de la production agricole, puis de la consommation pour récolter, préparer cuire les denrées alimentaires; viennent ensuite celles de protection pour confectionner des vêtements, édifier des maisons et, enfin, les différentes techniques.
Aucune de celles-ci n'utilise le machinisme; des appareils aussi courants et simples que le tour du potier sont inconnus des Manding. En général, les artisans sont, ici, des cultivateurs, exerçant à leurs moment de loisir et pendant la saison sèche, un métier dont ils tirent de petits profits, mais qui ne les nourrit pas.
Cependant, quelques rares ouvriers ambulants, fabricants de mortiers, pilons, plats en bois et réparateurs de calebasses, vivent à peu près de leur industrie, de même que les tisserands, à condition de ne pas demeurer toujours au même endroit et d'aller chercher la clientèle.
Enfin, une autre activité de plus en plus importante doit être mentionnée. Depuis que la sécurité, imposée par l'autorité administrative permet la circulation, le commerce s'est étendu de village à village, de province à province et même de peuple à peuple. Les Manding y participent, spécialement les dyula, qui ont donné leur nom à tous les colporteurs et marchands ambulants. Mais la plupart restent cultivateurs. Attachés au village pendant la période des pluies, en général ils voyagent seulement durant la saison sèche. Les travaux agricoles traditionnels restent dans leur esprit les plus importants.
Ainsi s'affirme, même dans l'élément mobile de la population, l'attachement de ces hommes à une forme de production dont leurs ancêtres tiraient, à peu près toute leur subsistance et qui se réalisait dans le cadre territorial, dans celui de la parenté classificatoire et de la famille agnatique.