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Henri Labouret

ancien Gouverneur des Colonies
Professeur à l'Ecole Nationale des Langues orientales vivantes
et à l'Ecole Coloniale

Les Manding et leur langue
Gouvernement Général de l'Afrique Occidentale Française
Bulletin du Comité d'Etudes Historiques et Scientifiques de l'A.O.F.
T. XVII, n° 1, Larose, Paris, janv.-mars 1934. 270 pages.

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Introduction

Ce Manuel est un ouvrage élémentaire, simplifié à dessein, et qui résume des cours professés depuis plusieurs années à l'Ecole Nationale des Langues Orientales Vivantes et à l'Ecole Coloniale.

Destiné à des élèves sur le point de s'embarquer pour l'Afrique Occidentale, il est composé de manière à servir d'instrument de travail sur place, renferme une bibliographie copieuse sans être exhaustive, expose enfin dans une première partie le sommaire de nos connaissances actuelles sur le pays, l'histoire, les collectivités et quelques faits sociaux. En signalant les phénomènes décrits par de précédents auteurs, le Manuel s'efforce de compléter certaines informations et de suggérer sur quelques points de nouvelles recherches plus approfondies et plus directes.

La seconde partie, essentiellement linguistique constitue, dans mon esprit, une sorte d'introduction à l'ouvrage posthume de Maurice Delafosse, La Langue Mandingue, dont j'ai assumé le remaniement partiel et la correction après la mort prématurée de l'auteur. Ce magistral traité déroute un peu les débutants par son étendue et son développement théorique, l'étude préalable du Manuel permettra, je l'espère, d'en aborder la lecture avec plus d'aisance et de fruit Toutefois ce livre n'est pas un simple résumé du premier, dont il se sépare sur plusieurs points, notamment en ce qui touche la conjugaison. On y trouvera un assez grand nombre de définitions qu'il a paru nécessaire de rappeler à des commençants et un choix important d'exemples. Il lui manque des exercices progressifs pour confirmer les règles de grammaire et un lexique. Le nombre et la complexité des dialectes manding n'ont pas permis d'introduire utilement ces additions dans ce petit ouvrage.

Pour faciliter les comparaisons entre les différents parlers malinké, bambara et dyula, des textes fondés sur le même thème: « La récompense d'une bonne action » ont été insérés à la fin de la deuxième partie, traduits et appuyés de quelques remarques grammaticales.

Transcription adoptée

Le manding ne s'écrivant pas, il a été nécessaire d'adopter un mode de transcription permettant de représenter les sons de la langue avec autant de fidélité que possible. Dans ce but, on s'est appuyé sur les principes autrefois dégagés par le P. Sacleux et résumés dans cette formule : « Un seul signe pour chaque son et un seul son pour chaque signe. » Par suite :

  1. Toute lettre représente un son et tout ce qui est écrit se prononce. La transcription phonétique n'admet donc pas de lettres muettes, comme il s'en rencontre en français (tu dors).
  2. Un même son doit toujours s'exprimer par la même lettre et celle-ci n'a qu'une seule prononciation. En écriture phonétique, il ne saurait exister de différence entre la prononciation de c et de g suivant qu'ils sont placés devant une voyelle ouverte ou fermée.
  3. Tout son simple est représenté par un seul signe ; par conséquent, on ne peut écrire des mots comme peulh.
  4. Tout son complexe est représenté par chacun des signes correspondants.
Jusqu'à présent, trois systèmes principaux ont été en usage pour la notation des idiomes négro-africains.
  1. 1) Le premier peut être qualifié de diacritique ; il emploie les lettres de l'alphabet latin, modifiées au moyen de marques placées au-dessus et au-dessous de chacune d'elles de manière à représenter les sons que l'alphabet latin ne peut rendre. Le Standard Alphabet de Lepsius, inventé dans la seconde moitié du XIXe siècle, en est un exemple. Il a été largement utilisé dans les importants travaux linguistiques dus aux missions anglaises et allemandes d'Afrique.
    On lui a reproché, avec raison, sa complication et, en même temps, son insuffisance pour représenter des sons particuliers aux langues négro-africaines. C'est pourquoi le R. P. Schmidt, directeur de la Revue Internationale Anthropos, entreprit, en 1907, de le réformer et de le perfectionner. Il employa dans ce but des lettres latines plus ou moins modifiées et affectées de marques diacritiques.
Quelques années plus tard, le P. Sacleux inventait, à son tour, un autre alphabet, à peu près basé sur les mêmes principes, mais renfermant des signes différents de ceux précédemment utilisés.
  1. Un système particulier, comportant des lettres latines, des signes diacritiques en nombre restreint et des lettres nouvelles, a été inventé et répandu par l'Association Phonétique Internationale. Les symboles adoptés par cet organisme sont relativement simples, mais insuffisants eux aussi pour rendre des sons fréquents dans des langues parlées hors d'Europe, c'est pourquoi on a dû y introduire des lettres empruntées au grec, d'autres qui sont retournées, des signes spéciaux qui le rendent compliqué parce qu'il cherche à tout noter.
    En 1925, la Conférence des Linguistes, réunie à Copenhague pour étudier les problèmes de la transcription et de la translittération, a fait remarquer avec raison que l'on doit toujours distinguer entre une notation large et une notation étroite. Dans l'une, les diverses nuances sont indiquées avec toute l'exactitude possible; dans l'autre, beaucoup de particularités phonétiques d'importance secondaire ne sont pas signalées, de manière à rendre l'écriture, l'impression et la lecture plus aisées.
    Toute langue comporte, en effet, des détails qui dépendent de la structure générale du parler étudié ; il n'y a qu'à les indiquer une fois pour toutes dans des observations préliminaires.
  2. L'Institut International des Langues et Civilisations Africaines s'est efforcé de profiter des expériences antérieures et d'adapter le système de l'A. P. I. à la notation large des langues négro-africaines. Sa méthode, exposée dans une brochure parue en 1930, Practical Orthography of African Languages, a été bien accueillie en Angleterre et en Allemagne. Les signes employés dans ce manuel se rapprochent le plus possible de ceux recommandés par cet organisme. Toutefois, ils comportent certaines modifications et se rattachent, par certains côtés, à ceux préconisés dans les instructions linguistiques de l'Institut d'Ethnologie de Paris, rédigées par M. Ie Professeur Marcel Cohen.

On trouvera dans la partie linguistique de cet ouvrage de nombreux exemples concernant les formes dialectales; celles-ci sont précédées d'une majuscule indiquant:

B le dialecte des Bambara
K le dialecte des Kassonké
D le dialecte des Dyula
M C le dialecte commun des Malinké
M N le dialecte des Malinké du Nord
M S le dialecte des Malinké du Sud
M O le dialecte des Malinké de l'Ouest
M E le dialecte des Malinké de l'Est